Moi, on ne parle jamais de moi. (En cours d’enregistrement)

On m’a proposé
de faire ma guitare
de m’accompagner
de revoir mes gammes
de chanter moins vite
de coucher avec moi
de parler moins franc
de savoir qui je suis
et mes parents aussi
de réduire mon histoire
de booster mes mélodies
de définir mon style
et puis de tout changer peut-être
pour mieux réussir

Mais moi, on ne parle jamais de moi.
Jamais un avis qui soutient devant eux, toujours un peut-être devrais-tu.

Vous savez comme si les femmes, on ne devait surtout pas parler d’elles.
Ou pas trop vite
Vous voyez ce que je veux dire ?
Qu’elles se démerdent, qu’elles soient parfaites,
Et on en reparle

Je regarde un « collègue » chanteur
qui a sa bite et son couteau à chanter
qui parle encore des femmes comme de courbes
qu’il découvre dans l’obscurité
quelle poésie !
Qu’est-ce qu’on parle de lui !
Qui prend son violoncelle pour la femme de sa vie
qui chantonne l’essentiel
car l’essentiel c’est lui, la bohème
sa guitare pour repli
pour qui la liberté c’est une bière et un oiseau

Elle, on ne parle jamais d’elle
Jamais des choses qu’elle cherche
jamais un mot « je n’ai jamais rien entendu de pareil »
Jamais vous ne lui facilitez la tâche
à lui laisser la même place qu’à vous pendant des années
Il faut tout de suite que
plus elle est brillante
plus vous lui trouviez un coin d’ombre

Mais je devine quelque chose.
C’est que les femmes ne s’accaparent pas un milieu.
Elles traînent et écoutent le merle autant que la pie.
Les vagues autant que l’aube silencieuse
Les femmes elles se jettent dans les oursins
quand elle veulent se baigner
parce que personne ne leur a dit, on ne leur parle jamais
que pour leur dire qu’on veut coucher avec elles
Toujours la même rengaine
parce qu’elles sont enthousiastes
elles sont libres, elles veulent l’être
c’est une question de vie
bouleverser le langage
l’écoute qu’on a de lui
sans cesse

Je vis sans homme
qui me dit

Mais les hommes n’aiment pas
qu’il n’y ait pas d’hommes autour
je vous le dis

« Injustement méconnues ».

Queers, femmes, trans, ça manque de poésie pour vous ?
Vous riez des lettres que l’on entasse.
« Ça n’est pas gage de qualité. »
« Affaires de bonnes femmes » ou « bizarrerie »
vous proclamez l’égalité
bien trop vite

Un homme se plaint trop quand il n’est pas cité.
Il ne sait pas soutenir
dans l’obscurité.
ou seulement quand la femme l’a déjà convaincu.

En somme ?
Libérez la poésie
de ce qui vous conforte.
Ce n’est pas nous qui devons
c’est vous qui avez.

 

Mymytchell. 2021.